MORTS DE LA GUERRE DE 14-18
LE CAZAL DES FAURES
Commune de Moulin Neuf

 

Bezombes Léopold  Jean Joseph est né le 4 octobre 1868 au Cazal des Faures de Pierre et Marguerite Delpoux.

 

BEZOMBES LEOPOLD
 

Léopold Bezombes était le capitaine commandant la 30e batterie du 57e Régiment d'artillerie de campagne qui faisait partie du 3e  groupe d'artillerie de la 44e  division.

 
LE CANON DE 75 du 57eme REGIMENT D'ARTILLERIE
Les batteries étaient dotées de quatre canons de 75 (Calibre : 75 mm) . Ce furent les premiers canons de campagne à tir rapide. Leur portée maximale était de 8000 à 11000 mètres. La cadence de tir était pouvait atteindre 28 coups/mn , dans la pratique six coups/mn.

L'équipe de pièce était composé de sept servants.  Le chef de pièce dirigeait les opérations. Le tireur était responsable de l'ouverture et de la fermeture de la culasse et du tir, mais aussi des changements de hausse. Le pointeur s'occupait du pointage en site et en dérive. Le chargeur positionné derrière le pointeur, engageait la cartouche dans la chambre.  Deux pourvoyeurs alimentaient en obus. Un déboucheur perçait les évents des fusées puis transmettait l'obus au chargeur.
Le canon de 75 mm modèle 1897 fut développé avec deux types de munitions différentes : l'obus explosif et l'obus à balles.

L'obus explosif modèle 1897 est en fonte à parois épaisses.  Lors de l'explosion, les parois épaisses sont littéralement déchirées et elles deviennent des projectiles dangereux (éclats) dont les plus gros peuvent être mortels jusqu'a de grandes distances.

L' obus à balles
est appelé aussi "Shrapnel". Il est doté de parois en acier très minces. Il est chargé de 290 balles sphériques en plomb durci mélangées à de la poudre noire. Conçu pour éclater avant de toucher le sol grâce à une fusée fusante à double effet , il projette ses balles sur les adversaires à découvert.

 

 
EXTRAITS DU JOURNAL DE MARCHE DE LA 30° BATTERIE
 
Capitaine Commandant : Léopold Bezombes. Lieutenant : Pujo. Sous Lieutenant : Bastin,
Cette unité était connue comme 30ème batterie de renforcement du 57ème régiment d’artillerie de campagne, dite de Mirepoix, dans l’Ariège (1)
 
LA MOBILISATION
Le mardi 4 août 1914, 3eme jour de mobilisation. TOULOUSE
Ainsi commence le journal de l'unité :
La guerre a été déclarée à la France par l'Allemagne. Notre mobilisation connue depuis trois jours, se poursuit sans relâche et avec un entrain admirable. Le noyau de la 30eme batterie, grossi de quelques réservistes déjà arrivés, occupe son cantonnement.
A savoir, le quartier compris l'avenue de Paris à l'Est, et le canal du midi au sud, la rue du Béarn prolongée à l'ouest, la rue du Cailloux gris au Nord. Le bureau le magasin d'habillement et trois pièces d'artillerie sont installées aux Minimes, couvent de la Sainte Famille, chez les sœurs.
 

 

Le "rôle" du personnel loge en face à l'ancien couvent. Le parc sera installé ultérieurement dans la plaine qui se trouve entre le magasin à fourrage et le canal. Le magasin d'harnachement, sous un hangar à proximité chez M. Lacroix artificier. Le capitaine a décidé de loger tous les chevaux chez M. Sistar (fabrique de couverture) rue Chaussat.
Les sœurs de la Sainte Famille sont gentilles et donnent aux hommes tout ce qu'ils ont besoin Une vieille sœur de la Croix Rouge apporte à mes hommes de grands plateaux couverts de gâteau C'est en pleurant qu'elle nous dit regretter son grand âge qui l'empêche d'aller soigner nos malheureux blessés. Nous avons reçu hier le lot d'habillement. Aussi dés ce matin professionnels et tailleur du régiment cousent galons et... Ils sont aidés, naturellement, par les bonnes sœurs qui s'emploient de leur dans ce travail d'un nouveau genre.

Les réservistes arrivent. A 15 heures nous percevons le harnachement. Le soir à l'appel, le noyau s'est grossi et la batterie comporte déjà la moitié de son effectif. présent.
 

Mercredi 5 août  : La Compagnie continue a grossir. Une corvée, envoyée au quartier, ramène au cantonnement les réservistes. Immédiatement ils sont habillés et classés. Nous touchons également 60 chevaux sur les 97 prévus au carnet de mobilisation.
 
Jeudi 6 août : Nous continuons à former notre unité tant hommes que chevaux. L'effectif en hommes dépasse de 99 éléments le chiffre de 171 prévu par le règlement. Ceci permet d'éliminer les sujets malingres ou d'esprit frondeur. Les hommes sont plein d'enthousiasme. Nous apprenons que nous embarquerons le surlendemain à minuit à la gare Raynal pour partir pour partir le lendemain 9 aout à 3h23 par la ligne de Cette et nous arrêter à Nîmes. En effet à Nîmes la 30eme batterie du 57° est appelée à former un groupe avec deux batteries du 38° rattachée à la 44° Division d'Infanterie. L'Angleterre a déclaré la guerre à l'Allemagne.
 
Vendredi 7 août : A sept heures, au hangar du matériel, perception de la deuxième partie du lot de matériel.  La batterie est complète en chevaux et en hommes.
Le Capitaine fait atteler les chevaux. Au départ, grandes difficultés de la part des chevaux, qui ne sont habitués, ni à la ficelle, ni au marcher en groupe, ni à être montés. Autant de nouveautés qui devront être surmontées par des conducteurs ayant perdu depuis longtemps l'habitude du cheval. Cet essai laisse de piètres résultats. La conclusion immédiate est que nous devons prendre en main ces divers éléments avant avant de prétendre aller à la frontière affronter le feu de l'ennemi.
 
Samedi 8 août : J'ai reconnu hier soir l'emplacement de l'aire d'embarquement. A 9h 30 nouvelle marche, afin de confirmer les chevaux de trait. Deux accidents peu graves aux chevaux. Un coup de sabot à un homme (tibia droit) nécessite son transport à l'infirmerie. Départ pour l'embarquement à la gare Raynal. Enthousiasme de la population toulousaine. Ovations et fleurs. Départ du train le neuf aout à 3h 33.

Dimanche 9 août : Destination du train:  Nîmes. A Narbonne, halte repas, café, eau alcoolisée, mais rien à manger. Soleil éclatant Chaleur insupportable. Arrivée à Nîmes à 17 heures.
Débarquement en 3/4 heures.
Notre arrivée n'est pas prévue. Difficultés sérieuses pour obtenir des  renseignement. Place, brigade, commandant du dépôt, ignorent tout de notre arrivée. Au 38° on nous renseigne. Les deux autres batteries sont au Mas de Bourg et au Mas de Miramont. Notre cantonnement est prévu au Mas Merlet où nous arrivons à 21 h.  Les officiers sont logés chez M. de Chaussy (Loriol). Accueil très aimable. Cantonnement dans d'excellentes conditions.

10/11/12/13 août : Marches de manœuvre Le Merlet, Marguerittes, Polygone , Nîmes. retour à 9h30. Chaleur étouffante, moustiques. On apprends qu'on doit se rendre, par étapes, dans la vallée du Rhône pour embarquement.
Le commandement nous annonce que l'on va aller sur Besançon.
Occupation de positions prés de Bouillargues. A l'échelon, simulacre d'attaque de cavalerie. La batterie est enfin bien en main. Tout le monde marche à merveille.

Vendredi 14 août : Veille du départ. Manœuvres habituelles à 6 h vers Bouillargues. On apprends qu'on part vers Belfort.
 

LES OPERATION D'ALSACE
La première offensive eut lieu du 7 au 13 aout 1914. Les forces allemandes campaient sur la rive droite du Rhin. Les  patrouilles françaises avaient convaincu l'Etat Major de la faiblesse des effectifs ennemis. Il fut décidé de lancer une offensive pour se rendre maître des ponts du Rhin. Elle ci n'aboutit pas.
Le Général Joffre ordonna de lancer une seconde offensive. Des forces  importantes furent rassemblées à partir du 11 août sous le commandement du général Pau. Il disposait de prés de 11500 hommes.
Du 16 au 19 aout les armées ennemies seront repoussées. Cependant les Allemands devaient rapidement reprendre l'offensive et reconquérir Mulhouse.
 
Samedi 15 août : Reconnaissance du train d'embarquement. Revue d'armes et de munitions à 9h30 . Distribution des munitions. Embarquement à 18h 40 à la gare Petite Vitesse de Nîmes, matériel à quai, chevaux en pleine voie. L'embarquement est terminé à 19h20. Départ du convoi à22 h 37. Les hommes peuvent se reposer dans des wagons de voyageur à raison de cinq par compartiment. On prévoit d'arriver à Belfort le 16 à 23h
 

Dimanche 16 août : Journée de voyage. Halte repas à Orange à 1h 30. Nous croisons un train de tirailleurs, puis un train de blessés, à Vienne. Ils sont nullement déprimés, ce qui nous donne beaucoup de courage. Ils nous apprennent que notre artillerie fait de "la bonne ouvrage" vers Mulhouse.
Départ de Bourg à 10h 45. Constitution d'un piquet de vingt neuf hommes contre les aéroplanes, dans un wagon à houille. A 19 h passage à Besançon. 23h 45 arrivée à la gare de Belfort pour débarquement. La pluie tombe à torrents.
 

Lundi 17 août : Le débarquement est terminé à 1h30. Nous avons appris que nous devons aller rejoindre le groupe à  Morvillars (territoire de Belfort) à huit kilomètres. On attends le jour sous les marquises des magasins d'une place de Belfort. Arrivée de la batterie à Morvillars à huit heures. Les deux autres batteries partent vers Boiron . Installation au cantonnement où se trouve déjà le 159° Régiment d'Alpins. On touche la carte de mobilisation.
 

 
LE BAPTEME DU FEU
 
Mardi 18 août : Nous quittons le cantonnement à 4 h30 vers le croisement de la route de Grosne, où étaient les deux autres batteries, et de la route de Boiron à Dammerkirch (Dannemarie, Haut Rhin).
 

 

Mercredi 19 août : Marche vers la ligne Altkirch Mulhouse. Epais brouillard. La 44eme division doit aller occuper les environs de Illfunth, Froningen, Flaxlanden au sud de la 66e Division. Ce bourg proche de Mulhouse eut beaucoup à souffrir au cours de la bataille du 19 août 1914. Plus de 600 soldats allemands et 900 hommes du 97° RI laissèrent leur vie sur les pentes du Geissberg.
A 5h 30 l'avancée de la colonne de gauche de la Division est gênée par la 66e division qui est en retard et dont deux régiments se présentent avec un certain désordre.
9h30 Arrivée à Brinighoffen. On entends les premiers coups de canon au Nord Est, vers Mulhouse. Nous avançons dans une sorte de couloir entre le canal et la ligne de chemin de der. Position d'attente à Zillishem dans le village ( environ 7 km de Mulhouse)  Le canon et la  fusillade se sont rapprochés. La 28° batterie est appelée à prendre position pour tirer sur Flashslanden.
Le capitaine de la 30° part en reconnaissance. La batterie part au trot. Voitures engagées dans des chemins inaccessibles. Des obus, coups longs destinés à la 28°, pleuvent. Obligation de faire demi-tour sous un feu d'enfer. La batterie repart sans avoir subi de pertes et va prendre position huit cents mètres en arrière. Elle tire 15 coups et est obligée de se retirer parce que elle se trouve sans soutien, l'infanterie ayant battu en retraite. Elle se retire dans la direction d'Ilfurth. Encombrement des routes... C'est presque la panique... La 28es'est repliée abandonnant trois pièces sous un feu très dense.
On part cantonner à Aspach à 23h45.
 

 
Jeudi 20 aout : Départ 3h 30. Pas de renseignement sur l'ennemi. On va occuper une position tenue hier par le deuxième groupe pour tirer vers Luenmschviller.
 
Vendredi 21 aout : On occupe la même position. A 11 heures, cesser le feu. Ordre d'amener les avants train direction Altkirch et Belfort pour embarquer. Les Allemands ont été repoussés au delà de Mulhouse vers la foret de Hart. Cantonnement à Chavanneuil l'Etang où nous arrivons à 23h.

Canon allemabd détruit Bezombes

Samedi 22 aout : Réveil à 7h. Les hommes sont reposés. Départ pour Belfort à 19h. Embarquement prévu à Belfort Chantier N°2 à 1h. On retraverse la frontière, mais vers la France cette fois. Le poteau frontière tricolore est salué avec joie.
 
Dimanche 23 aout : On commence l'embarquement à 4h 45. La feuille de transport porte Epinal. Nous allons vers la Lorraine.
 
LES VOSGES - LA CHIPOTTE
 
Lundi 24 aout : On débarque à La Chapelle devant Bruyères  vers 1h 30 après un trajet très long et pénible. Chevaux et hommes n'ont rien mangé depuis 24h. Cantonnement à Laval puis Bruyères.

Mardi 25 aout : On marche de Laval à Rambervilliers vers les bois d'Anglemont.
Mise en position de batteries (1er section) à la lisière du bois. Déluge d'obus de 105 des allemands. Devant nous une pièce du 59e est détruite. Les six servants sont mis hors d'état de servir. Quelques uns sont blessés mortellement. Les blessés commencent à défiler devant nous. Deux attelages de la 28e démolis sont abandonnés sur la route du milieu du bois.
Le cheval du trompette meurt, un éclat d'obus dans la cuisse. Nous quittons la position à huit heures pour aller cantonner à la belle étoile à Housseras. Le sous lieutenant Bertin, qui nous quitte, va prendre prendre le commandement de la 28e, avec son ordonnance et son cheval.

 

L’adjudant-chef Ivan Cassagnau du 57° raconte : La bataille des frontières est engagée et c’est très vite, le second baptême du feu.
Dès lors, les heures s’accélèrent et le temps manque pour coucher sur le calepin cette terrible bataille de Chipotte qu’il couvre d’acier. Les Allemands ont déjà donné leur nom aux artilleurs des 75 : les « bouchers noirs » (1
)

 
Mercredi 26 aout :  Position de batterie sur le plateau en arrière du bois d'Anglemont. Nous tirons sur Anglemont, Menil et sur Bellevitte, tir sur zone. De l'artillerie ennemie nous est signalée à Bazien.
On tire à 6000 m, 6100 m, 6200 m (180 obus explosifs, 183 obus à balles)
 
Jeudi 27 aout : Pluie diluvienne depuis hier soir. On tire aujourd'hui de la même position et avec beaucoup de précision grâce au téléphone sur Nossoncourt et Bazien. Le tir est très efficace. On tire ensuite sur le bois de Bazien à obus explosifs. (tir de siège au niveau 7200 à 7600). Des obusiers tirent sur nous sans faire de mal et cependant ils nous encadrent à cent mètres et sont en direction.
Leurs avions les servent admirablement. Depuis quatre jours on mange à peine, on dort deux ou trois heures par nuit. La fatigue commence à se faire sentir. La pluie continue, fine et froide.
 

 
Vendredi 28 aout : Même position de batterie, mais cette fois il est probable que nous avons été repérés. Car nous sommes là, depuis une heure à peine, que les obus se mettent à tomber sur nous, comme la grêle. Les coups longs tombent sur Bru, à mi distance de Rambervillers.
Les avant train de la 28e écopent : six hommes atteints, dont deux morts, quatorze chevaux tués. On va prendre position à Larifontaine. On ne tire pas. Puis, à Saint Benoit de Chipotte, en arrière de l'église. On tire sur le col de la Chipote à 5100 m, route de Raon l'Etape.
Les obus de 105 nous arrivent, peu après, mettant la révolution au village, où tombent tous les coups longs. Encore une fois pas de blessés chez nous. On rentre à travers bois, poursuivis par les tirs des 105.
 
Samedi 29 et dimanche 30 aout :  On nous envoi nous refaire une santé à Frémifontaine. Tout le monde a besoin d'un petit repos! D'autant que le soleil luit ardemment. Concert, de midi à deux heures, par les hommes de nos trois batteries. Bonne journée qui retrempe le moral. Les lettres arrivent enfin, et tout le monde est content.
Le 30 aout la 44e Division est disloquée pour constituer des groupements de champs de bataille. Les éléments de la 89e brigade sont mis  sous les ordres du général Vassart avec mission d'enlever le col de la Chipotte

Mardi 1er septembre : La batterie reste sur la position. Reconnaissance d'aéroplanes allemands qui lancent deux bombes n'atteignant heureusement personne. Quatre chevaux sont morts.
 
Mercredi 02 septembre : Départ à 4h. La batterie va se former, en rassemblement d'attente, sous la lisière de la foret de Rambervilliers (vallée de la Mortagne). Délicieux bivouac sous bois.
A midi, départ de la batterie pour Larifontaine. Mise en batterie. La pièce de droite en surveillance à 150 millième à gauche du col de Chipotte. Au loin, un ballon captif allemand dont on se défile avec des feuillages. Bivouac à Larifontaine. Un conducteur est nommé brigadier.
 
Jeudi 3 septembre : Mise en batterie, à la pointe du jour, au Nord de Larifontaine. Les hommes construisent des tranchées profondes. Les pièces sont masquées avec des feuillages. Nous essuyons le feu des obus de 105.
Un aéroplane allemand nous survole, va-t-il nous apercevoir? Le système de réglage par aéroplane fonctionne réellement bien en Allemagne. Mais nos pièces sont bien abritées, et nous passons inaperçus. Vers le soir un aéroplane portant des cibles tricolores vole à environ huit cents mètres et lance deux pièces de magnésium au dessus du village. Qu'est ce à dire?  Est-ce une félonie nouvelle des Allemands?
Nous subissons un feu nourri d'artillerie, absolument en direction sur nous. On se blotti dans les tranchées. Pas de mal. A 19h bivouac.
 
Vendredi 4 septembre : Même position de batterie. L'ennemi est à Saint Benoit. Tir sur zone vers Saint Benoit. La réponse ne tarde pas et nous subissons un feu continu d'une intensité inouïe. Les grosses marmites arrosent le village. Nous sommes tous blottis dans les tranchées.
Une batterie nous tire de front, l'autre en enfilade, les tranchées de fantassins sont copieusement arrosées et ils doivent se retirer tous, compagnie par compagnie. Nous n'avons plus d'infanterie devant nous. Une seule compagnie dans le village nous sert de soutien. Vers dix huit heures, accalmie. Nous sortons de nos trous de taupe au complet.
 
Samedi 5 septembre : Nous allons nous mettre en position d'attente à la lisière de la foret. Un peu de répit.
Les cuisiniers par leur fumée maladroite nous font repérer par un aéroplane ennemi. Nous levons la position pour aller dans la foret de Frémifontaine. Mise en batterie à trois cent mètres au sud est du village. Confection de tranchées. Nous couchons auprès de nos pièces.
Le lendemain les travaux de terrassement continuent. Temps radieux. Les cloches de Frémifontaine sonnent allégrement. Le matériel est nettoyé et graissé.
 
Lundi 7  septembre : Les hommes touchent du vin et la gaîté est revenue à la batterie. On se retrempe complètement

Mise en place canon de 75

Mardi 8 septembre : départ à 11 heures. En position d'attente dans un bois situé au sud est de Jeanmenil . Tir intermittent jusqu'à 21 h dans la direction de St Benoit. Bivouac au sud de Jeanménil. Un canonnier est évacué sur l'hôpital d'Autrey  (ancienne abbaye au nord de Frémifontaine)
 
Mercredi 9 septembre : Départ à 4h. En batterie à huit cents mètres a l'est de Jeanménil. Les obus allemands éclatent à trois cents  mètres devant nous. Nous fournissons un tir très nourri dans la direction de St Benoit jusqu'à sept heures où a lieu l'attaque générale de l'infanterie. Le chais abandonné d'un marchant de vin de Jeanménil fournit du vin gratuitement à la troupe. Gaité. Félicitations importante. Nous avons fait paraît-il un travail utile et les fantassins avancent. A seize heure la canonnade allemande recommence. Les éclatements viennent jusqu'à cent mètres de nous, mais ne nous atteignent pas.
A 19h 30 on lève la position pour aller bivouaquer à Fraispertuis. La pluie, toujours la pluie. Impossible de dormir. Mauvaise nuit.
 
Jeudi 10 septembre : Réveil à quatre heures. Même positon de l'artillerie que hier.  A 10h15 la canonnade allemande recommence. A 19h les pièces restent sur place et sont gardées. Les hommes vont cantonner à Fraispertuis.  Un canonnier est évacué sur l'hôpital d'Autrey.
 
Vendredi 11 septembre : Départ à 4h30. Mise d'une batterie à cinq cents mètres de la gare de Jeanménil,  prés de la voie de chemin de fer. Deux "Rimathos" se trouvent à notre droite, ainsi qu'une batterie de 95. Il pleut.  La batterie est gardée. Les hommes sont cantonnés. Un canonnier est évacué, deux chevaux sont morts.

St Benoit de Chipotte en ruine

Saint Benoit de Chipotte

 
Samedi 12 septembre : Réveil à 3h30. Les Allemands ont fait un tour en arrière. Nous allons vers St Benoit et le col de la Chipotte. Sur la route trouvé un obus de 200 allemand non éclaté.
St Benoit, désastre, horreur, le clocher est sapé à la base, l'église et la plupart des maisons sont éventrées. Parmi les décombres des cadavres carbonisés, l'un d'eux, une baïonnette plantée dans le dos. Nous voyons les effets de nos obus explosifs qui ont déchiqueté les bois.
Mise en batterie à la Neuveville. Les hommes sont cantonnés
 
Dimanche 13 septembre :  Confection de tranchées couvertes. Pas un coup de canon de tiré. Trois jours suivants :  repos  puis revue d'armes,  promenade des chevaux.
Jeudi 17 septembre:  Promenade des chevaux et revue d'habillement. Les hommes de la batterie sous les ordres du Lieutenant Prijo fleurissent les tombes des braves, morts au champ d'honneur. Le maréchal des logis Planté est évacué sur l'hôpital de Raon.
 
Vendredi 18 septembre : La 44° division fait partie du Corps d'Armée provisoire, son artillerie est placée sous les ordres du Lieutenant Colonel Vinet.  Rassemblement général de la batterie à dix heures. Lecture d'un ordre général de félicitations du Président de la République. Rassemblement de la batterie à quatorze heures pour l'inspection du colonel. Décoration d'un maitre pointeur du groupe.
 
Mardi 22 /mercredi 23 septembre : ordre de lever la position. Départ à 14h pour Jeanménil. Le maréchal des logis Planté et un canonnier sont de retour. trois chevaux sont morts. Inspection générale des chevaux par le vétérinaire. sept chevaux sont évacués.
 
LES COTES DE MOSELLE
 

Vendredi 25/ samedi 26 septembre : Départ à 8h. Arrivée à Aratel  à quinze heures. Les hommes et les chevaux sont cantonnés. Trois chevaux évacués. Position d'attente sur la rive gauche de la Moselle.
Embarquement à midi. Record de temps d'embarquement (55mn). Arrivée à Toul à vingt et une heure. Débarquement puis départ pour Lucey (8km). Cantonnement à Lucey.
 

 
Dimanche 27 septembre : Départ à 4h30 pour Frémeréville sous les Cotes à une quinzaine de kilomètres au nord de Commercy. Le fort de Gironville à notre gauche est fortement bombardé.
 A 13h20 tir sur Apremont la Foret à intervalles de cinq minutes. Observation du tir par le capitaine. Transmission des commandements à la voix. Vers le soir trois obus tombent à deux cents mètres de la batterie. On couche sur la position.
 
Lundi 28 septembre : Mise en batterie à cinq cents mètres à l'ouest de la ferme. Construction des tranchées habituelles. Derrière nous passe un régiment de dragons. Nous tirons entre 6000 m et 6800 m sur des colonnes d'infanterie ennemies en marche. On couche sur place.
 
Mardi 29 septembre : Tir sur tranchées, à mi cote, à 5500 m. Cent quatre vingt dix coups par pièce. On couche sur la position. Un cheval est évacué.
 
Mercredi 30 septembre : Réveil dans le brouillard. Réglage de nos canons. Un aéroplane allemand nous survole un moment. Quelques obus de 105 tombent à notre gauche. A 14h on lève la position et, par un chemin aussi défilé que possible, la batterie s'engage dans le bois de Saulcy. Trois pièces mettent en batterie à 3000 m environ au Sud-est de Loupmont.
Nous sommes batterie d'infanterie. Le Colonel Marchand dirige l'action. Sont avec nous, dans les parages, le 7eme Dragon, le 1er chasseur à cheval et les 5eet 6e de marsouin.
La première pièce est amenée à la lisière devant Loupmont à un kilomètre à peine du village. Tir sur l'artillerie, à vue, entre 1600 m et 2400 m. Résultat magnifique! Un caisson ennemi saute et le lieutenant est content et nous félicite. Couronnement:  50 obus à balle et 31 à explosif. A la nuit, six mitrailleuses sont installées devant la 1ere pièce à la lisière. On couche sur place.
 
Le Journal de Marche de la 4eme Division rends comte du fait d'armes :

A noter le tir heureux d'une pièce amenée en avant du bois qui, en quelques coups réussit à réduire au silence deux pièces de 77 repérées par le Colonel Marchand sur la croupe du "Mont" et une autre pièce visible sur le flanc du Mont dont on vit sauter un caisson.
 

 

 
Jeudi 1er octobre :
 La 1ere pièce est relevée par la 4eme à la lisière du bois.
Le colonel Marchant est là. Le capitaine commandant (Léopold Bezombes) est à la lisière, tout prés de la pièce avancée. Il commande les trois autres pièces par téléphone.
Tir sur artillerie vue. Chaque pièce en surveillance sur un point différent. Plusieurs objectifs sont signalés, immédiatement battus.
 Vers 16h30 les obusiers allemands tirent sur notre infanterie à la lisière du bois. Un obus touche en plein la pièce avancée. Elle tue l'adjudant Dubois et le maréchal des logis Reynes. Elle blesse six servants :  Pegas, Bourgoin, Presougues, Cazal, Dubergey, Runscan, qui sont évacués sur l'hôpital de Commercy.
Un deuxième obus tue le capitaine (Léopold Bezombes) et le maréchal des logis Mondy qui est évacué.
 
Jusqu'à cette heure fatale, depuis six mois de campagne, les batteries n'avaient pas eu une seule blessure déplorée.
La consternation est dans la batterie. Nos braves camarades, morts face à l'ennemi, sont ramenés en arrière.
La pièce démolie est accrochée à son avant train et et dirigée sur Fremeréville. Tout le personnel restant rends les hommages aux nobles dépouilles qui vont être enterrées dans le cimetière de Frémeréville

Cimetiére de Fremereville

Cimetière de Fremereville

 
LA FAMILLE BEZOMBES ET LE CAZAL DES FAURES
La famille Bezombe est longtemps restée présente dans la commune de Moulin Neuf, en tant que propriétaire foncier, au Cazal des Faures et à là La Redonde. En l'an 2000 les descendants de Pierre Bezombes firent donation à la commune de Moulin Neuf de plus de dix hectares de bois au lieu de Bramefam. Le maire Auguste Pech signait le 11 octobre 2000 l'acte de transfert de propriété.
 
 
SOURCES
Archives Etat Civil Mairie de Moulin Neuf
Site Web Mémoire des hommes
Ministère de la Défense,  Service Historique de la Défense, Inventaires, Cote 1007/1, Journal des Marches et des Opérations 57eme Régiment d'artillerie de campagne.
Ministère de la Défense,  Service Historique de la Défense, Inventaires, Cote 26N 1007/15, Journal des Marches et des Opérations 30eme batterie.

Ministère de la Défense,  Service Historique de la Défense, Inventaires, Cote
26 N 405/1, Journal des Marches et des Opérations 44eme Division
IGN - G
éoportail
(1)
. Journal d’un artilleur. 1914 – 1916. Paris, Buchet-Chastel, 2003

24/03/2012